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La mobilité conventionnelle vs la mobilité hydrogène

La mobilité conventionnelle, basée sur les moteurs thermiques, contribue fortement aux émissions de gaz à effet de serre. Le secteur des transports représente 32 % du total des émissions des gaz à effet de serre en France en 2022. Face aux défis environnementaux, des alternatives comme l’hydrogène décarboné se développent pour réduire cette empreinte carbone. Cet article propose l’état d’avancement et des points essentiels relatifs au secteur de la mobilité. La comparaison prend en compte l’extraction de la matière, afin d’avoir une vue d’ensemble des impacts.

1 - Contexte de la production des énergies
Le pétrole est une énergie fossile extraite par forage dans des gisements souterrains. Cette étape consomme une quantité significative d’énergie pour alimenter les mécanismes, effectuer les traitements et assurer la maintenance des puits. Ces processus génèrent des émissions de CO2. 
En effet, les ressources de pétroles sont limitées et de plus en plus énergivores à extraire. En 2010, il fallait consommer en moyenne un baril de pétrole existant pour extraire cinq barils, une donnée variable selon les zones d’extraction.
Le pétrole brut subit alors un raffinage pour produire des carburants utilisables comme l’essence et le diesel. 
Ce processus émet des gaz à effet de serre et génère des sous-produits polluants, à moindre coût, ce qui lui confère le meilleur rapport quantité d’énergie/prix du marché.
Le carburant fossile est peu onéreux à produire et à distribuer, comme tout liquide. Avec plus d’un siècle d’expérience, les technologies sont fiables et simples à maintenir au regard des réseaux de techniciens qualifiés en place.

Hydrogène décarboné
Quand on parle de décarbonation, il convient d’écarter l’hydrogène carboné : il représentait en 2021 près de 96 % de la production mondiale d’hydrogène, mais il émet près de 7 T de CO2 pour produire 1 T d’hydrogène. Par conséquent, seul l’hydrogène décarboné produit à base d’énergies renouvelables ou nucléaire a du sens dans le contexte de transition énergétique, et la France dispose d’un avantage compétitif certain grâce au faible facteur d’émission de sa production électrique.
La production d’hydrogène décarboné repose sur l’électrolyse, qui divise l’eau en dihydrogène et dioxygène à l’aide d’électricité issue de l’éolien ou du solaire, notamment.
Cependant, ces sources sont intermittentes, entraînant des défis pour une production d’hydrogène en continu. De plus, ce processus nécessite beaucoup d’eau douce, une ressource vitale menacée. L’impact environnemental de la fabrication et du recyclage des équipements, tels que les panneaux solaires et les éoliennes, doit également être pris en compte dans l’analyse du cycle de vie.
Une autre méthode de production d’hydrogène décarboné est la méthanisation de la biomasse. Le principe est de récupérer les déchets de biomasse, de les brûler pour les gazéifier et de récupérer d’un côté, du bio méthane et de l’autre, de l’hydrogène. Ainsi, la production d’hydrogène décarboné est plus respectueuse de l’environnement que celle des combustibles fossiles, mais avec d’autres défis à relever. Quant à sa distribution aux usagers, il est transporté par transport routier, soit par réseau gazier, soit par combinaison des deux.


Les étapes du processus
(Tableau 1 ci-dessus)
2 Chaînes énergétiques de la mobilité
2.1 Enjeux de stockage de l’énergiedans l’engin mobile

Facilement stocké dans un réservoir à liquide, le carburant fossile est injecté avec de l’air dans un moteur à combustion interne pour produire une énergie mécanique avec un rendement moyen proche de 30 %. Cette énergie est alors dirigée vers la boîte de vitesse, les roues et autres consommateurs. Malgré ce faible rendement, la quantité d’énergie mécanique produite par un moteur diesel reste cependant inégalable compte-tenu de la place disponible pour le réservoir dans un véhicule mobile.
Quant à l’hydrogène, malgré son atout majeur qui réside dans sa densité énergétique massique (2,8 fois supérieure à celle de l’essence), ce gaz à l’état naturel est très volumineux (11 000 L / Kg d’hydrogène à pression atmosphérique). Il doit être comprimé sous haute pression, généralement 350 ou 700 bars, ou liquéfié à très basse température (- 253 °C ou 20 K) pour être stocké dans des réservoirs. Leur encombrement et leur masse doivent être pris en compte dès le début de la conception.
Par ailleurs, comme pour tout accumulateur gazeux, le débit en hydrogène d’un réservoir diminue au fur et à mesure qu’il se décharge, ce qui tend à réduire la puissance du consommateur.
Les temps de recharge en énergie fossile ou hydrogène sont relativement proches. Par exemple, le temps de recharge du Renault Kangoo Z.E. Hydrogen est de seulement 3 mn, ou encore, celui du tracteur John Deere 6210R rétrofité par le groupe Vensys est de 10 mn. (Schéma 1 ci-dessous)
2.2 Transmission de puissance par hydrogène :
technologies disponibles
2.2.1 Pile à combustible (PAC) et transmission électrique L’hydrogène, après avoir été détendu à basse pression ( < 20 bars), est consommé par la PAC. Celle-ci convertit l’hydrogène en électricité via une réaction électrochimique, alimentant un système de puissance électrique tel un générateur avec un rendement de conversion proche de 50 % dans un système hybride à batterie et cela progresse encore.
L’association dite en parallèle à batterie Li-Ion sert à opérer la PAC à son point de rendement optimal tout en répondant aux sollicitations rapides du moteur électrique qui entraîne mécaniquement le véhicule. On obtient alors la meilleure technologie de stockage d’énergie décarbonée avec la meilleure technologie de transmission de puissance qu’est l’électrique, dont les convertisseurs et moteurs affichent des rendements très élevés ( > 90 %).
Cette application technologique, récente, est encore coûteuse et complexe. 
Elle nécessite une spécialisation pour intervenir sur ce type de composant. La propreté de l’air consommée par la PAC est aussi une contrainte à gérer par une filtration efficace.
2.2.2 Moteur à combustion hydrogène
Les moteurs thermiques peuvent être adaptés pour fonctionner à partir d’hydrogène, de la même manière que les carburants fossiles. Le rendement de ce moteur est comparable à celui d’un moteur thermique essence (30 %). Ce procédé permet de conserver des chaînes de production industrielle existante, de bénéficier de la fiabilité des moteurs à combustion, de reconduire les transmissions de puissances mécaniques conventionnelles vers les roues. L’avantage de la combustion hydrogène par rapport aux carburants fossiles est la réduction presque totale des émissions de CO2.
En revanche, le procédé de combustion produit de l‘eau mais également du Nox, un gaz polluant de l’air qui nécessite un post traitement de dépollution. La propreté de l’air consommée est également une contrainte à gérer par une filtration efficace. À cela s’ajoute les vibrations et le bruit d’un moteur à combustion. 

3 - Exemples d’applications de mobilité lourdes existantes
3.1  Transport lourd

Les camions à hydrogène (ex. Nikola, Toyota) utilisent des piles à combustible pour offrir une autonomie élevée ( > 500 km) et un temps de recharge rapide. Leur principal défi reste le déploiement des stations de ravitaillement.
3.2 Engins de travaux publics
Des prototypes d’engins de chantier à hydrogène (tel que JCB) utilisent un moteur à combustion hydrogène, évitant ainsi les contraintes des batteries électriques. L’approvisionnement en hydrogène sur les chantiers demeure un obstacle clé.
3.3 Tracteurs agricoles
Des prototypes comme le John Deere 6210R rétrofité en H2 par eNéo/Vensys group développent des solutions hydrogène adaptées aux besoins agricoles. 
L’enjeu principal est l’adaptation des exploitations à une chaîne d’approvisionnement en hydrogène fiable et abordable.
Conclusion
Embarquer de l’hydrogène dans un engin mobile offre une des meilleures autonomies parmi les solutions décarbonées. Utiliser cette énergie requiert une conversion en travail mécanique utile, soit par un système électrique alimentée par une PAC, soit par un moteur à combustion dont les émissions de NOx demeurent problématiques.
Le stockage à haute pression se fait dans des temps acceptables pour une recharge en cours de journée, malgré un déficit d’énergie embarquée dans le véhicule par rapport aux carburants fossiles liquides. L’usage des piles à combustible permet la conversion vers l’électrique, mais avec l’inconvénient du prix encore élevé à l’achat.
Le reste de la chaîne de transmission avec la batterie et le moteur électrique commence à s’ancrer dans notre quotidien pour les bénéfices avérés sur les rejets de CO2 à l’usage. Comme toute solution en rupture avec les transmissions traditionnelles, le besoin de compétences spécifiques pour l’installation, la maintenance de ces équipements est à développer pour permettre le suivi de ces équipements à faible impact carbone.
Sortir des énergies fossiles se fera nécessairement par une diversité de solutions techniques et énergétiques. L’hydrogène bas carbone montre sa pertinence directement utilisée sur des applications de transport lourd, routier, ferroviaire, maritime mais aussi sur des engins de construction ou agricoles. La qualité de densité énergétique de l’hydrogène le rend également pertinent pour acheminer de l’énergie que l’on peut convertir en électricité pour des engins électrifiés qui opèrent sur des sites isolés. Cela ne sera cependant possible qu’à condition que la production et la distribution d’hydrogène bas carbone augmente fortement (tableau 2).

Sources 
- https://www.encyclopedie-energie.org/competitivite-hydrogenes-gris-bleu-vert/
- https://adimas.paris/facteurs-d-emission-du-mix-electrique-france-et-europe/
- https : //www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-transports-2024/20-emissions-de-gaz-a-effet

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