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Transmissions hydrauliques, pneumatiques et mécaniques :
les grands axes d’évolution technologique

Une étude réalisée pour le Comité Programme « Transmissions et Roulements » du Cetim permet de mettre en évidence les opportunités de développement des transmissions hydrauliques, pneumatiques et mécaniques. Notamment en regard de la concurrence de l’électrique, de la montée en puissance de la mécatronique et de l’évolution des normes et de la réglementation liées à l’environnement et au développement durable. Résultats : l'identification de plusieurs axes d’évolution technologique et l’élaboration des stratégies de croissance correspondantes.

Les grandes tendances technologiques du marché des transmissions de puissance ont été mises en lumière à l’occasion de la troisième édition de la Journée « Transmissions et Roulements » organisée fin 2012 par le Cetim dans ses locaux de Senlis, en partenariat avec Artema. Confiée à l’organisme Tech2Market sur la base d’un cahier des charges élaboré avec Artema, une étude prospective sur le développement des technologies de transmission met ainsi d’emblée l’accent sur la généralisation de la mécatronique. Déjà complètement intégré dans la chaîne d’information, la régulation, la commande ou les capteurs, ce concept est en forte progression dans des domaines tels que la maintenance préventive et la sécurité.

Progression de l’offre électrique
Cette évolution se trouve en quelque sorte renforcée par l’adoption d’une approche multi-technologique de la part des industriels des transmissions, qui raisonnent de plus en plus en termes de « fonctions ». Les grands donneurs d’ordres, quant à eux, prônent dorénavant une approche « coût global », relève l’étude, qui insiste également sur l’importance de l’efficacité énergétique en tant que moteur des évolutions technologiques (composants vs systèmes…). Dans ce contexte, les transmissions fluidiques et mécaniques se trouvent confrontées à la progression de l’offre électrique, que ce soit dans un cadre de concurrence directe (faibles puissances, pneumatique…) ou d’alliance en vue de la définition de solutions optimisées (association moteur/réducteur, systèmes hybrides…). A cet égard, tant l’étude du Cetim que les responsables d’Artema s’attachent à souligner la forte activité de lobbying déployée par les « électriciens » en vue de peser sur la réglementation et la normalisation et imposer des solutions « tout électrique ». Enfin, l’étude souligne le déficit d’image et la pénurie de compétences dont souffrent les professions mécaniques et fluidiques. Deux grands obstacles qui figurent de longue date parmi les défis qu’elles s’efforcent de relever.

Sept axes d’évolution technologique
Sur cette base, sept grandes évolutions technologiques se dégagent : la montée en puissance des transmissions hybrides hydraulique/électrique ou pneumatique/électrique ; la baisse de la consommation d’énergie (puissance de pilotage, réduction des pertes et des frottements, allégement) ; la diminution des pollutions directes (niveau sonore, amélioration de l’étanchéité) ; l’utilisation de fluides « propres » (moins corrosifs, biodégradables…) ; l’accroissement des performances (capacité de stockage, précision de positionnement, robustesse des composants, vitesse de déplacement, rapport poids/puissance, accroissement des débits et des pressions) ; l’amélioration de la sécurité, de la sûreté de fonctionnement, de la surveillance et de la maintenance préventive (notamment via la mécatronique) ; et enfin, l’utilisation de méthodes d’optimisation des systèmes en amont : dimensionnement, choix des composants, flexibilité… Ces différents points communs verront leur importance varier en fonction des professions. Ainsi, en hydraulique, les innovations récentes sont souvent générées par les efforts déployés en vue d’une meilleure efficacité énergétique et du respect de l’environnement. L’utilisation d’huiles biodégradables ou de l’hydraulique à eau, le traitement des boues d’usinage des composants, l’amélioration de l’étanchéité des éléments de connexion et de la tenue en température des joints, l’optimisation des dentures des pompes à engrenages, l’hybridation hydraulique/électrique, l’accroissement des débits et pressions des transmissions hydrostatiques ou encore l’utilisation de différentes techniques de récupération d’énergie œuvrent notamment en ce sens.

Rendement énergétique
On retrouve le thème de l’amélioration du rendement énergétique dans le domaine des transmissions pneumatiques, via la récupération de l’air de détente ou de la chaleur du compresseur, par exemple. Outre l’amélioration de l’étanchéité des composants et de la connectique, on constate la montée en puissance de la mécatronique (commandes servo-pneumatiques, capteurs intégrés à l’actionneur) ainsi que la mise en œuvre de vérins pneumo-hydrauliques combinant la rapidité d’approche et de retour de la pneumatique avec la puissance de travail de l’hydraulique. Les transmissions pneumatiques sont également à la recherche de la miniaturisation des composants et prônent l’utilisation des techniques d’amortissement par décélération du piston qui se traduisent par une réduction de l’usure, du bruit et des vibrations. Des solutions mixtes mécanique/électrique sont également développées dans un souci d’efficacité énergétique. L’utilisation de roulements « energy efficient » s’inscrit dans ce cadre. Les roulements voient en outre leur durée de vie prolongée grâce à la mise en œuvre de solutions de diagnostic permettant d’anticiper leurs premiers signes de fin de vie. L’apport de la mécatronique y est notable, notamment dans les roulements instrumentés (avec capteurs). Enfin, les transmissions mécaniques travaillent à l’allégement des composants grâce à l’emploi de matériaux composites. Des techniques sont en cours d’industrialisation, notamment dans les applications embarquées…

Tendances et opportunités
L’étude du Cetim s’attache également à hiérarchiser les atouts et voies de développement des différentes techniques de transmission de puissance tels qu’ils sont perçus par les utilisateurs finaux (voir tableau ci-dessous). Sur cette base, se dégagent un certain nombre de tendances et d’opportunités pour ces techniques en fonction des marchés d’applications. 

Ainsi, dans la construction navale, par exemple, une réflexion est menée visant à remplacer les transmissions hydrauliques par l’électrique sur la propulsion auxiliaire et les portes de bordées. Il n’en demeure pas moins que les transmissions hydrauliques sont au cœur du savoir-faire des entreprises de ce secteur et qu’elles demeurent indispensables pour les fortes puissances. Dans l’automobile, les directions assistées passent actuellement à l’électrique, mais l’hydraulique peut continuer à jouer leur atout « sécurité » dans ce domaine. De même, si les autorités militaires ont actuellement dans leurs cartons un projet de navire de guerre tout électrique, la défense reste par ailleurs un domaine tributaire du civil pour les véhicules du génie. Or, « l’hydraulique est une technologie incontournable pour les engins de TP », relève l’étude. Dans ce secteur ainsi que celui des machines agricoles, des développements sont néanmoins en cours pour la rotation électrique des tourelles des petits engins (10-25 tonnes) tandis qu’une réflexion est lancée concernant la direction. Dans le domaine engins mobiles, « la récupération d’énergie constitue un axe de développement majeur pour les technologies hybrides hydrauliques », estime le Cetim. Dans l’aéronautique, les transmissions électriques se développent fortement sur des applications telles que le verrouillage de trappes et portes, les inverseurs de poussée et le freinage. Les commandes électriques de vol font aussi l’objet de développement en cours.

Solutions hybrides
La machine-outil est un autre domaine fortement concurrencé par l’électrique, avec la mise en œuvre de moteurs et variateurs de vitesse dans l’injection caoutchouc, de machines tout électrique dans l’injection plastique et de techniques électromécaniques sur des machines de découpe-emboutissage de faible et moyenne puissances. L’étude du Cetim note cependant « un maintien du marché machines-outils pour les applications hydrauliques à fortes puissances ». Idem pour les machines spéciales où l’utilisation des robots de services tout électriques est limitée aux faibles puissances. En termes de robotique spécialisée, un fort potentiel est identifié pour les transmissions hydrauliques dans les secteurs chimique, agroalimentaire et pharmaceutique ainsi que sur les robots de services industriels miniaturisés de fortes puissances ou résistant à des conditions extrêmes (nucléaire, offshore). L’hydraulique devrait se maintenir sur le marché des énergies renouvelables via les solutions hybrides. On constate ainsi l’arrivée de solutions électromécaniques en remplacement des systèmes auxiliaires des éoliennes ou du tracking photovoltaïque, par exemple. Les énergies fossiles, quant à elles, continuent à faire appel à l’hydraulique du fait des fortes puissances dont elles ont besoin (offshore, engins miniers). A l’avenir, les énergies marines (hydroliennes, houlogénérateurs, vannes de barrages, compensateurs de houle pour plateformes offshore) constitueront, selon le Cetim, « un marché en émergence et à fort potentiel pour les technologies hydrauliques ». L’étude identifie enfin de belles opportunités pour l’hydraulique dans les applications scéniques de fortes puissances ainsi qu’en industrie lourde pour le développement de machines de très fortes puissances (sidérurgie, grosses presses à injecter). 

Concurrence ou complémentarité ?
Les transmissions pneumatiques se voient également fortement concurrencées par l’électrique. C’est particulièrement vrai dans le domaine ferroviaire avec le développement en cours du freinage ou des essuie-vitres en électrique. Les exigences sécuritaires du secteur continuent cependant à engendrer de belles opportunités pour la pneumatique. Les machines de conditionnement, quant à elles, adoptent des solutions électriques en cas de besoin de grande précision, de positionnements multiples et d’applications horizontales. De même, les machines spéciales font maintenant appel à des solutions mécatroniques. La pneumatique est cependant loin d’avoir dit son dernier mot. Notamment avec la généralisation potentielle au secteur agricole du freinage pneumatique issu du routier. Ou encore, sur des marchés de niches tels que les petits engins miniers où ses atouts devraient lui permettre de se maintenir ou se développer. L’étude du Cetim décèle également un fort potentiel de développement pour les transmissions pneumatiques sur les machines de conditionnement, les robots de services industriels et robots autonomes avec capacité de stockage importante ou encore les marchés de la méthanisation et de l’environnement (collecte centralisée, tri sélectif). La concurrence de l’électrique affectera aussi à court ou moyen terme les transmissions mécaniques. Que ce soit dans le domaine de la défense, des engins de TP et agricoles (motorisation dans les roues), de l’automobile (motorisations hybrides et électriques), de la machine-outil (moteurs + variateurs), de la robotique industrielle ou des énergies renouvelables (remplacement à moyen terme du réducteur principal par des solutions « direct drive » et des générateurs à aimants permanents). En revanche,  le Cetim perçoit peu de risques pour les transmissions mécaniques sur les équipements scéniques et dans l’aéronautique et identifie des opportunités pour ce type de transmissions dans plusieurs autres domaines : automobile (sécurité), défense (réflexion sur l’hybridation parallèle des véhicules blindés) ou énergies renouvelables. Par contre, c’est dans le cadre d’associations avec des technologies hydrauliques ou électriques que les transmissions mécaniques trouveront de nouveaux débouchés sur les marchés de l’extraction des énergies fossiles, de l’industrie lourde, de la machine-outil et de la robotique industrielle…

Un avenir mécatronicien ?
Du point de vue des utilisateurs, l’efficacité énergétique est un facteur important, mais n’apparaît pas toujours au premier rang des critères de différenciation entre les différentes technologies de transmission de puissance, conclut l’enquête du Cetim. Dans ce contexte, le développement d’outils d’évaluation et de comparaison permettra d’établir des bilans globaux. En revanche, la mise au point de solutions mécatroniques apportera les réponses adéquates aux exigences des industriels en termes d’encombrements moindres, de gains de poids et de maintenance facilitée. Au total, c’est le développement multi-technologique qui apparaît de plus en plus comme une réelle opportunité de croissance pour les professions de la transmission de puissance dans le cadre de solutions globales proposées à leurs clients. On peut donc penser que les frontières entre les différentes technologies sont amenées à s’ouvrir à plus ou moins brève échéance dans le cadre d’un avenir mécatronicien. Les lignes vont bouger et les compétences se rejoindre. Avec des mutations plus ou moins faciles à appréhender selon les spécialités. A ce titre, l’étude du Cetim n’hésite pas à aller à l’encontre des idées reçues quand elle conclut sur le fait que, aux yeux des donneurs d’ordres, « si les industriels des professions fluidiques et mécaniques peuvent migrer vers les compétences électriques et électroniques, c’est moins le cas pour les industriels de l’électrique »… 

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